L’école en pistes
Par Société des agrégés, le 5 mars 2016
La baisse du niveau des élèves français est devenue un lieu commun et chaque publication de l’enquête PISA vient renforcer le constat que l’école française n’a pas su relever le défi de la massification. Pendant ce temps, sur les pistes, l’augmentation du nombre de skieurs, due à une démocratisation – bien réelle même si on peut considérer qu’elle n’est pas encore suffisante – des sports d’hiver, est manifestement allée de pair avec une élévation générale du niveau. Quel est le secret du ski français ?
Les progrès en matière d’équipement ont certainement contribué à rendre la pratique du ski plus aisée (poids allégé, skis plus maniables) mais la création de ce qui deviendra l’École du ski français, sous l’action conjuguée du ministre des sports Léo Lagrange et d’un champion de ski Émile Allais en 1937 y est certainement pour quelque chose. Aujourd’hui l’école compte 17 000 moniteurs diplômés d’État, reçoit chaque année 2 millions d’élèves et fait passer 800 000 tests.
Les cours de ski sont caractérisés par un certain nombre de contraintes qui pourraient rendre la tâche de l’enseignant difficile : un temps extrêmement limité (une semaine), des conditions extrêmes (froid et dangers de la montagne), une technicité importante (utilisation d’un matériel spécifique et d’installations particulières), des élèves de niveau et de constitution extrêmement variables.
Ces contraintes sont surmontées avec succès grâce à plusieurs facteurs. L’École du ski français sélectionne avec soin ses moniteurs dont le niveau est élevé et homogène : aux qualités sportives exigées, certains ajoutent la pratique de plusieurs langues dans lesquelles ils sont capables d’enseigner. Les groupes formés sont composés d’un petit nombre d’élèves. Un enseignement technique et exigeant est apporté dès les premiers cours aux débutants, même en bas âge, car la sanction est immédiate : si les consignes ne sont pas respectées on tombe !
Les exigences correspondant à chaque niveau sont très clairement définies et font l’objet d’une communication claire. Les tests de fin de parcours sont composés d’exercices précis et constants dans le temps, ce qui contribue à cette clarté. Les groupes formés sont de niveau homogène, indépendamment de l’âge : au début de la semaine, quel que soit le cours initialement choisi, les enfants et adultes peuvent être amenés à changer de groupe. L’enseignement est alors tout à fait adapté au niveau du groupe et le moniteur sait faire évoluer ses élèves jusqu’à l’objectif fixé de façon progressive dans le temps imparti.
Tous les élèves ne deviendront pas, loin s’en faut, des champions, mais chacun pourra aller au bout de ses aptitudes grâce à la difficulté croissante des enseignements jusqu’aux cours de compétition. Et si, sachant conjuguer souplesse d’organisation et attention à chacun avec clarté des objectifs et exigences, si sachant enseigner à tous sans renoncer à la compétition, l’ESF nous donnait quelques pistes pour notre école ?
Publié sur theconversation.com le 4 mars 2016