Rapport – Malaise enseignant
Par Société des agrégés, le 1 mai 2010
Alors que l’opinion prend connaissance du rapport « Bien-être et efficacité au travail », commandité par le Premier Ministre, portant sur l’entreprise privée, et qu’au même moment, les demandes d’aide de nos adhérents se multiplient, il nous a semblé nécessaire d’enquêter sur les causes du mal-être dont les professeurs – qui disent pourtant aimer leur métier – font état.
Cette tâche est aussi nécessaire que délicate, tant les déformations que l’on fait subir à leur image et à leur fonction leur causent d’incompréhension et de souffrance. Ajoutons à cela le sentiment fréquent d’être à la fois abandonnés à leur sort, bannis du débat et montrés du doigt. Récemment encore, l’annonce de l’ouverture prochaine d’une conférence nationale sur les rythmes scolaires a engendré des effets incontrôlables et libéré, dans l’opinion, le déchaînement d’une incroyable hostilité envers les professeurs.
Y abondent les mêmes éternels poncifs : fainéantise, vacances perpétuelles, privilèges injustifiés, « qu’on les mette enfin au pas »…
Certes, notre enquête met à jour des éléments déjà connus. Il y a la modicité de leur rémunération avec laquelle certains professeurs arrivent à peine à subsister et que l’on n’ose même plus, de manière générale, comparer avec celle des cadres du privé ; il y a la pachydermique lenteur de la progression de carrière ; il y a ces conditions d’exercice pénibles que chacun connaît, que nul ne songe à leur épargner et dont nul ne veut les plaindre.
Mais notre rapport révèle que l’essentiel est ailleurs : un projet concerté de longue date et menant à la disparition prochaine de la portée intellectuelle de l’enseignement secondaire. Ses effets sont multiples. Les professeurs se plaignent de la défiance qu’on leur témoigne : défiance qui mène à leur raccourcir la bride et à réprimer une liberté pédagogique, devenue suspecte alors qu’elle était l’honneur de la fonction ; défiance qui conduit à faire peser sur eux une surveillance accrue et à refuser de prendre en compte les nombreuses heures qu’ils emploient nécessairement à l’élaboration de leur enseignement ; défiance aboutissant à une condamnation sévère du caractère intellectuel de leur profession considéré comme une sorte de ferment d’indiscipline alors qu’il est la seule raison véritable de leur existence.
Ni les gouvernements successifs, ni l’opinion n’ont pris conscience de la chance pour un État de pouvoir s’appuyer sur des cadres aussi
compétents : on les verra ici sous leur vrai jour, exigeants dans leur réflexion, passionnés par leurs travaux, prodigues de leur temps,
ambitieux pour leurs élèves.
La Société des agrégés occupe une position privilégiée pour s’engager dans ce type d’action : association rompue à la réflexion et au débat, elle a une approche du terrain unique, grâce aux contacts réguliers qu’elle entretient avec ses adhérents. Elle peut ainsi donner un écho précis, réaliste et non partisan, aux témoignages des professeurs. L’association souhaite que les constats mis en lumière par ce rapport, parfois durs à admettre autant qu’à faire entendre, puissent chasser les fausses représentations sur lesquelles reposent les débats actuels.
Texte complet du rapport à télécharger.