Baccalauréat J-1 : crainte et résignation
Par Société des agrégés, le 4 juillet 2013
Tandis que les élèves de terminale sont dans les affres d’une attente qui prendra fin demain, une interrogation : pourquoi, alors qu’il est statistiquement devenu bien plus facile de passer cet examen avec succès, le baccalauréat suscite-t-il encore tant de crainte et d’agitation ?
On voit souvent moins dans le baccalauréat un examen permettant de faire ses preuves qu’une loterie où l’on rêve du coup de chance.
Aux choix stratégiques d’options, rendus compliqués par l’opacité de l’offre, à des coefficients extrêmement variables d’une série à l’autre et d’une discipline à l’autre, à un mélange entre les notes uniques issues du contrôle final et les moyennes du contrôle continu, à des barèmes incompréhensibles (on ne pense pas seulement à l’affaire du français d’Orléans-Tours mais aussi à la notation des épreuves écrites et orales de langues comprenant des notes prédéterminées et artificiellement élevées – voir notre analyse), s’ajoute l’absence de consensus net sur ce qui est acceptable ou non, exigible ou non des candidats, le tout étant couronné par une révision a posteriori des notes, appelée pudiquement harmonisation.
Si bien qu’aucun candidat ne sait exactement comment a été obtenue la note qu’il a reçue. Et il ne pourra demander à personne de le lui expliquer, qu’il ait réussi ou échoué : ses professeurs ne seront pas loin d’être aussi perdus que lui, son correcteur n’est pas sûr de retrouver la note qu’il avait initialement mise.
La racine de l’injustice se trouve là.
Il faut des critères transparents et compréhensibles pour mesurer la performance : l’augmentation arbitraire des notes ne fait qu’ajouter au caractère aléatoire de l’examen
Une évaluation doit reposer sur des critères transparents et compréhensibles. Ce n’est malheureusement plus le cas du baccalauréat dont le niveau est incertain puisqu’il dépend moins de la valeur éprouvée d’un candidat que de statistiques définies à l’avance.
Le caractère inéquitable n’est pas compensé par l’indulgence dans la correction ou dans l’augmentation arbitraire des notes qui ne fait qu’ajouter au caractère aléatoire d’un examen où disparaît la véritable mesure de la performance.
Se mesurer à soi-même pour éprouver la satisfaction du travail accompli plutôt que subir l’examen
C’est fort dommage, parce qu’il est nécessaire de conserver un tel examen, permettant à chacun de se mesurer, à travers les épreuves, à la difficulté et à̀ soi-même, de voir ce dont il est capable lorsqu’il est seul, d’être pleinement responsable. C’est dans l’épreuve que se trouve la vertu de l’examen.
Mais le baccalauréat aujourd’hui n’est pas une épreuve, il est seulement éprouvant pour les élèves sans leur apporter la satisfaction du travail accompli : impuissants, ils se verront, de surcroît, reprocher la facilité de l’examen qu’ils ont passé. Entre fatalisme et tremblement, ils subissent leur sort en attendant des jours meilleurs.