Le métier enseignant : ne nous divisons pas !
Par Société des agrégés, le 13 décembre 2013
Ces dernières semaines, la Société des agrégés s’est engagée pour défendre les professeurs de classes préparatoires, injustement touchés par une mesure destinée à augmenter leurs obligations de service sans contrepartie et à diminuer leur rémunération.
Nos collègues ont dû subir, en plus de l’annonce de cette mesure vexatoire, le discours rassis sur les privilèges des agrégés, sur leur position de nantis…
J’ai été peinée de voir une petite poignée de collègues estimer que c’est à bon droit que ces professeurs n’ayant pourtant pas démérité auraient dû voir leur salaire amputé de 10 à 15 %. Comme si cette lutte les desservait eux, alors que les agrégés, sans distinction de fonction, sont souvent en butte aux mêmes critiques et à la même haine. Si nous-mêmes, agrégés, défendant la mission intellectuelle du professeur et une juste rémunération des compétences reconnues par le concours, ne pouvons défendre nos collègues attaqués, que faire ?
Leur combat est celui de tous les agrégés, frappés depuis plus de trente ans par l’absence de revalorisation ; considérés comme des privilégiés parce que leurs obligations de service sont moindres ; vus comme des corps étrangers à expulser de l’Éducation nationale parce que leurs talents ne trouveraient plus à s’y employer.
Penchons-nous sur l’ensemble des mesures Peillon. Le calcul est rapidement fait : les nouvelles mesures proposées sont des mesures d’austérité qui ne disent pas leur nom. Tous les agrégés seront touchés : un professeur de BTS ? – 1 538 euros annuels ; un agrégé enseignant les SVT ou la physique au collège ? un agrégé de philosophie en terminale ? un agrégé de lettres modernes en lycée ? plusieurs centaines d’euros.
Bien sûr, les pertes sont moins importantes que celles qui étaient promises à nos collègues de classes préparatoires, mais elles portent sur un plus grand nombre d’enseignants. Et elles touchent des professeurs dont le pouvoir d’achat a fortement diminué ces dernières années. La discussion sur le «métier enseignant» a commencé par des disputes sur des euros et des heures, des calculs d’apothicaire sans rime ni raison. Avouons qu’il est tout de même insupportable d’aller affirmer que l’argent pris aux professeurs de classes préparatoires suffirait à soigner les établissements d’éducation prioritaire.
Pendant que l’OCDE voit dans les professeurs français les moins payés d’Europe et que PISA démontrerait que les systèmes les mieux classés sont ceux qui rémunèrent le mieux leurs professeurs, on prétend satisfaire tout le monde non par une hausse générale des salaires mais par la diminution de celui de quelques-uns. Que cela en trompe certains… pas nous, qui refuserons toutes les divisions !
(éditorial du 466 de L’Agrégation)